
La protection ultime d’un casque haut de gamme ne vient pas d’un unique matériau miracle, mais de l’ingénierie invisible qui orchestre la synergie de plusieurs fibres spécifiques.
- Chaque fibre (carbone, aramide, verre) possède une « mission » précise : rigidité, résistance à la perforation, ou dissipation d’énergie.
- La fabrication manuelle et la cuisson en autoclave, un savoir-faire quasi-artisanal, sont les garants de la cohésion et de la performance de cette armure composite.
Recommandation : Au-delà du marketing « 100% carbone », évaluez la technologie multi-composite et le savoir-faire du fabricant pour juger de la véritable performance d’un casque.
Face au mur de casques rutilants chez votre concessionnaire, le dilemme est universel. Cette coque en carbone, si légère et si chère, est-elle vraiment plus sûre que sa voisine en fibres composites, elle-même bien plus onéreuse que le modèle en polycarbonate ? Le motard passionné de technologie sait que son équipement est une extension de sa machine, une promesse de performance et de sécurité. Il est prêt à investir, mais il veut comprendre. Il veut déchiffrer le langage des matériaux qui se cachent sous la peinture vernie.
Le débat habituel oppose la légèreté des fibres à l’accessibilité du plastique injecté. On vante la noblesse du carbone, devenu un symbole de statut presque autant qu’un argument technique. Cette course aux matériaux de pointe ne se limite d’ailleurs pas à la tête ; elle se tisse jusque dans la doublure de nos jeans moto, où des fibres d’aramide promettent de sauver notre peau. Mais se focaliser sur un seul matériau, c’est passer à côté de l’essentiel. C’est admirer une brique en oubliant la cathédrale qu’elle permet de bâtir.
Et si la véritable clé de la sécurité et de la performance ne résidait pas dans la nature de la fibre, mais dans l’art de son assemblage ? Si le secret n’était pas le carbone, le Kevlar ou la fibre de verre, mais leur mariage savamment orchestré ? C’est le postulat de l’ingénierie des matériaux avancés : la performance naît de la synergie. Un casque n’est pas un bloc de matière, c’est une structure composite conçue pour une déformation programmée, une armure dont chaque couche a une mission mortelle à accomplir, et ce, une seule fois.
Cet article vous ouvre les portes du laboratoire. Nous allons décortiquer la science des composites, non pas comme un catalogue de matériaux, mais comme une masterclass d’ingénierie. Vous découvrirez le rôle précis de chaque fibre, les secrets d’une fabrication artisanale qui justifie chaque euro, et pourquoi le mythe du « tout carbone » est souvent une simplification marketing. Préparez-vous à ne plus jamais regarder votre casque de la même manière.
Pour naviguer dans cet univers de haute technologie, nous allons explorer en détail chaque aspect qui transforme une simple coque en un véritable système de sécurité. Le sommaire suivant vous guidera à travers les principes fondamentaux des matériaux composites jusqu’aux innovations de demain.
Sommaire : La science des matériaux composites pour l’équipement moto
- Verre, carbone, Kevlar : le guide pour comprendre le rôle de chaque fibre dans votre équipement
- Pourquoi un casque en fibres est-il si cher ? Les secrets de sa fabrication artisanale
- Le poids, c’est l’ennemi : comment un casque plus léger vous rend plus alerte et plus endurant
- Le mythe du « tout carbone » : pourquoi le mélange des fibres est souvent supérieur
- Le secret de votre jean moto : comment une doublure invisible peut vous sauver la peau
- Polycarbonate ou fibres : quel est le meilleur matériau pour la coque de votre casque ?
- Les matériaux du futur que vous ne trouverez que sur un prototype de course
- Le casque intégral : anatomie d’une décision non-négociable
Verre, carbone, Kevlar : le guide pour comprendre le rôle de chaque fibre dans votre équipement
Au cœur de la performance d’un casque, il n’y a pas un, mais plusieurs héros. Chaque type de fibre est sélectionné pour une propriété unique, et c’est leur combinaison au sein d’une matrice de résine qui crée une coque composite. Pensez à une équipe d’experts : chacun a sa spécialité, mais c’est leur collaboration qui résout le problème. L’objectif est double : dissiper l’énergie d’un impact sur la plus grande surface possible et résister à la pénétration d’objets pointus. C’est un équilibre subtil entre rigidité et capacité de déformation.
La fibre de verre est la base de nombreux composites. C’est le « soldat » fiable et polyvalent. Moins chère à produire, elle offre une excellente capacité à absorber l’énergie en se déformant et en se fracturant. Elle constitue souvent la structure principale qui assure la cohésion de l’ensemble. La fibre de carbone, quant à elle, est le « stratège ». Sa propriété maîtresse est une rigidité exceptionnelle pour un poids incroyablement faible. Elle assure que la coque ne se déforme pas de manière excessive à l’impact, répartissant ainsi la force sur une zone étendue. C’est grâce à elle qu’on peut obtenir un gain de 100 à 200 grammes sur un casque intégral par rapport à une version en fibre classique. Seule, elle peut être cassante ; son rôle est d’apporter l’armature.

Enfin, la fibre d’aramide (dont le Kevlar® est la marque la plus connue) est le « garde du corps ». Sa spécialité n’est pas la rigidité, mais une résistance phénoménale à la traction et à la perforation. C’est la fibre qui compose les gilets pare-balles. Dans un casque, son tissage serré agit comme un bouclier anti-pénétration, empêchant un objet pointu de traverser la calotte. C’est cette synergie – la rigidité du carbone, l’absorption du verre et le blindage de l’aramide – qui constitue le secret d’une protection optimale. Après un choc, ces fibres se brisent pour absorber l’énergie ; c’est pourquoi un casque doit impérativement être remplacé après une chute, même sans dommage visible.
Pourquoi un casque en fibres est-il si cher ? Les secrets de sa fabrication artisanale
Le prix d’un casque en fibres composites ne vient pas seulement du coût des matières premières, mais surtout d’un processus de fabrication long, complexe et majoritairement manuel. C’est un savoir-faire qui se situe à mi-chemin entre l’artisanat de luxe et l’ingénierie aérospatiale. Contrairement à une coque en polycarbonate injectée en quelques minutes, la création d’une coque en fibres demande des heures de travail méticuleux par des techniciens hautement qualifiés.
Le processus commence par la découpe des différentes « plis » de fibres. Chaque morceau de tissu (carbone, aramide, verre) est découpé selon un patron précis. Ensuite vient l’étape la plus critique : le drapage manuel. Un opérateur place, une par une, ces couches de fibres dans un moule, en respectant un ordre et une orientation très stricts. Cette orientation des fibres est cruciale, car elle détermine la manière dont les contraintes se répartiront dans la coque lors d’un impact. Une fois les couches assemblées et imprégnées de résine, le moule est fermé et placé dans un autoclave. C’est un four industriel qui va cuire la coque sous haute pression et à haute température pendant plusieurs heures. Cette étape est fondamentale : elle polymérise la résine et fusionne les couches en une seule pièce monolithique, ultrarésistante et légère, vidée de toute bulle d’air qui pourrait créer un point de faiblesse.
Étude de cas : Le processus autoclave des casques haute performance
La fabrication des casques en fibre de pointe, comme ceux utilisés en compétition, implique l’utilisation de moules fermés où les ouvertures (écran, aérations) sont ensuite réalisées par des jets d’eau à très haute pression pour une découpe nette sans fragiliser la structure. Le processus de stratification manuelle des couches de fibres, suivi de la cuisson en autoclave, transforme cet assemblage de tissus souples en une structure unitaire rigide et extrêmement résistante, optimisée pour la dissipation d’énergie.
Ce souci du détail a un coût, comme le résume une formule bien connue dans le milieu de la compétition :
Gagner 1 gramme coûte 1 euro.
– Alban Rojas, Responsable R&D Shark – Moto Magazine
Cette quête de la perfection explique le prix élevé. Chaque casque est presque une pièce unique, dont la qualité est ensuite vérifiée par des méthodes non destructives comme les ultrasons pour garantir une intégrité structurelle parfaite, avant même d’envoyer un casque sur 457 produits pour les tests d’homologation destructifs.
Plan d’audit pour évaluer la qualité d’un composite
- Inspection visuelle : Recherchez une finition parfaite du vernis. Toute imperfection (bulle, poussière) peut indiquer un manque de rigueur dans le processus de fabrication.
- Analyse de la fiche technique : Identifiez la composition exacte des fibres. Un fabricant transparent détaillera les types de fibres utilisées (ex: « carbone-aramide ») plutôt qu’un vague « multi-fibres ».
- Vérification du poids : Comparez le poids annoncé avec celui de modèles concurrents de même catégorie. Un poids significativement plus léger à taille égale est un bon indicateur d’une ingénierie avancée.
- Contrôle de l’homologation : Assurez-vous de la présence de la dernière norme (ECE 22.06), qui impose des tests bien plus stricts sur la résistance de la coque composite.
- Réputation du fabricant : Privilégiez les marques reconnues pour leur expertise dans les composites, souvent celles qui sont également engagées en compétition (MotoGP, WSBK).
Le poids, c’est l’ennemi : comment un casque plus léger vous rend plus alerte et plus endurant
En moto, chaque gramme compte. Mais lorsque ce gramme est porté sur la tête, son impact est démultiplié. La réduction du poids d’un casque n’est pas un simple argument de confort ; c’est un facteur de sécurité active majeur. Un casque plus léger diminue la fatigue, améliore la liberté de mouvement et, in fine, maintient le pilote plus alerte et plus longtemps.
Le principal bénéfice se mesure sur les longs trajets. Les muscles du cou et des trapèzes sont constamment sollicités pour maintenir la tête stable face au vent, aux vibrations et aux mouvements de la route. Un poids excessif sur la tête agit comme un levier, augmentant de manière exponentielle l’effort nécessaire. Des études biomécaniques sont formelles : l’impact n’est pas linéaire. Selon les experts, un casque 300g plus léger peut représenter plusieurs kilos de pression cumulée en moins sur les vertèbres cervicales sur un trajet de deux heures à 130 km/h. Cette différence est colossale et se traduit par une arrivée à destination moins fatigué, avec moins de contractures et une meilleure concentration.
Ce gain de vigilance est un élément de sécurité active. Un pilote moins fatigué est un pilote plus réactif. Il sera plus à même de tourner la tête rapidement pour un contrôle d’angle mort, de réagir à un imprévu et de maintenir une posture de conduite optimale. L’expérience des motards au quotidien le confirme.
Une enquête de la Mutuelle des Motards montre que le poids des casques (1700g en moyenne pour un modulable, 1500g pour un intégral) est considéré par les motards comme plus important que l’insonorisation. Un écart de 200-300g fait une différence significative sur la fatigue des cervicales et la sollicitation des muscles du cou lors de longs trajets.
– Enquête de la Mutuelle des Motards, rapportée par Moto Magazine
En cas de choc, la physique est implacable. L’énergie cinétique à dissiper est le produit de la masse par le carré de la vitesse (E=1/2mv²). À vitesse égale, une tête plus légère (casque inclus) subira moins de forces d’inertie, réduisant ainsi les risques de lésions cérébrales liées aux mouvements de rotation violents du cerveau à l’intérieur de la boîte crânienne. Investir dans la légèreté, c’est donc investir directement dans son endurance et sa capacité à éviter l’accident.
Le mythe du « tout carbone » : pourquoi le mélange des fibres est souvent supérieur
Le carbone fascine. Son motif tissé sous un vernis brillant est devenu le symbole ultime de la haute performance. Poussés par le marketing, de nombreux motards sont convaincus qu’un casque « 100% carbone » est le summum de la technologie. Pourtant, la réalité de l’ingénierie des matériaux est plus nuancée. La performance absolue naît rarement d’un extrémisme, mais plutôt d’un équilibre savant. Un casque entièrement en carbone peut même présenter des inconvénients que les composites multi-fibres cherchent à corriger.
Le carbone est extrêmement rigide, ce qui est excellent pour répartir la force d’un impact. Cependant, cette rigidité extrême peut s’accompagner d’un comportement « cassant ». Un composite qui intègre des fibres plus « ductiles » comme la fibre de verre ou des fibres organiques spéciales peut offrir une déformation plus progressive, et donc une meilleure absorption de l’énergie sur la durée du choc. De plus, la structure très rigide du carbone a tendance à très bien transmettre les vibrations et les ondes sonores, ce qui peut rendre ces casques plus bruyants et sujets à des phénomènes de résonance acoustique à haute vitesse. C’est l’une des raisons pour lesquelles certains fabricants de premier plan se refusent à produire des casques 100% carbone.
Étude de cas : L’approche Shoei AIM+ et le choix du multi-composite
Le fabricant japonais Shoei est un exemple emblématique de cette philosophie. Malgré sa maîtrise technologique, la marque a fait le choix stratégique de ne pas commercialiser de casque 100% carbone pour le grand public. Leur technologie de pointe, baptisée AIM+ (Advanced Integrated Matrix Plus), repose sur un mélange complexe de plusieurs couches de fibres de verre, de fibres organiques et de carbone. Cette approche multi-composite vise à obtenir le meilleur de chaque matériau : la rigidité du carbone, l’élasticité des fibres organiques pour l’absorption, et la résistance du verre. Le résultat est une coque qui offre une sécurité de premier ordre tout en maîtrisant les problèmes de résonance acoustique et en assurant une déformation contrôlée lors d’un impact.
Le but n’est pas de construire une coque indestructible, mais une coque qui se sacrifie de manière optimale pour protéger ce qu’elle contient. L’ingénierie moderne se concentre sur la création de « fusibles » structurels, où différentes couches de matériaux travaillent de concert pour absorber et dissiper l’énergie de manière séquentielle.

Le « meilleur » casque n’est donc pas forcément celui qui utilise le matériau le plus cher en exclusivité, mais celui dont la structure composite a été la plus intelligemment conçue. Il s’agit de privilégier l’ingénierie de l’assemblage à la simple noblesse d’un seul matériau.
Le secret de votre jean moto : comment une doublure invisible peut vous sauver la peau
La science des fibres hautes performances ne se limite pas aux casques. Elle s’est discrètement glissée dans notre garde-robe pour transformer un vêtement du quotidien, le jean, en un véritable équipement de protection individuelle. L’enjeu est de taille : protéger la peau de l’abrasion en cas de glissade, sans sacrifier le style et le confort d’un pantalon de tous les jours.
La solution réside, encore une fois, dans l’intégration de fibres techniques, principalement de la famille des aramides (comme le Kevlar® ou le Twaron®) ou des polyéthylènes à haut module (Dyneema®). Ces fibres, dotées d’une résistance exceptionnelle à l’abrasion et à la chaleur, sont intégrées au jean de deux manières principales. La première, plus traditionnelle, consiste à ajouter une doublure partielle ou complète sur les zones les plus exposées : fessier, hanches, genoux. Cette doublure agit comme une seconde peau, un bouclier invisible qui prend le relais lorsque le denim extérieur cède.
Les tests en laboratoire sont éloquents. Le laboratoire de certification CRITT a mesuré la résistance de différents modèles : là où un jean ordinaire se déchire en 0,54 seconde sur un bitume abrasif, les modèles renforcés tiennent entre 0,66 et 1,8 seconde. Les meilleurs jeans du marché, utilisant des fibres de pointe, pulvérisent ces scores. Par exemple, les tests en laboratoire démontrent jusqu’à 4,2 secondes de résistance à l’abrasion pour un jean renforcé avec une fibre aramide japonaise comme le Twaron. Ces quelques secondes font toute la différence entre une égratignure et une greffe de peau.
Étude de cas : Le dilemme de la technologie : doublure vs tissage direct
Une nouvelle génération de jeans moto a vu le jour, intégrant directement les fibres de protection dans le tissage du denim lui-même. Cette technologie « monocouche » offre un avantage considérable en termes de confort et de ventilation, car elle évite la superposition de tissus qui peut tenir chaud. Cependant, les tests du laboratoire CRITT Sports et Loisirs ont montré que si ces nouvelles technologies sont très performantes, les doublures traditionnelles en aramide, bien que moins confortables, offrent souvent encore une résistance brute à l’abrasion légèrement supérieure. Le choix se fait donc entre le confort et la ventilation maximaux d’un monocouche, et la protection absolue (mais plus chaude) d’une doublure aramide épaisse.
Le jean moto est l’exemple parfait de la discrétion de la haute technologie. Il conserve l’apparence d’un vêtement de tous les jours tout en dissimulant un niveau de protection qui était autrefois réservé aux combinaisons de cuir. Un arbitrage subtil entre sécurité, style et confort, rendu possible par la magie des fibres composites.
Polycarbonate ou fibres : quel est le meilleur matériau pour la coque de votre casque ?
C’est la question fondamentale qui structure le marché du casque : faut-il opter pour une coque en polycarbonate (thermoplastique injecté) ou investir dans une coque en fibres composites ? Il n’y a pas de mauvaise réponse, mais deux philosophies de protection, de durabilité et de budget radicalement différentes. Pour l’ingénieur, le choix se résume à une question de comportement du matériau face à un impact.
Comme le souligne un guide spécialisé, la différence fondamentale est industrielle : « Un casque fibre demande de procéder en plusieurs opérations par stratification, là où le polycarbonate est un plastique liquide moulé sous pression en une seule opération ». Cette distinction explique presque toutes les autres. Le polycarbonate absorbe un choc en se déformant profondément. Il agit comme un pare-chocs qui s’enfonce pour encaisser l’énergie. C’est efficace, mais cette déformation doit être contenue par le calotin interne en polystyrène (EPS). La coque en fibres, elle, est beaucoup plus rigide. Son travail consiste à répartir l’onde de choc sur la plus grande surface possible, limitant la déformation à un point précis. L’énergie est dissipée par la rupture des fibres et de la matrice de résine sur une zone étendue. C’est une stratégie de « bouclier » plutôt que de « coussin ».
Ce tableau comparatif synthétise les avantages et inconvénients de chaque technologie, vous permettant de faire un choix éclairé en fonction de vos priorités de motard. Il met en lumière le compromis constant entre coût, poids, longévité et mécanisme d’absorption des chocs.
| Critère | Polycarbonate | Fibres composites |
|---|---|---|
| Prix | Accessible (50-300€) | Élevé (300-1500€) |
| Poids | Plus lourd | 150g plus léger en moyenne |
| Durée de vie | 3-5 ans (dégradation UV) | 5+ ans (inerte chimiquement) |
| Absorption chocs | Déformation profonde | Dissipation sur large surface |
| Fabrication | Injection simple | Stratification manuelle |
Un autre critère décisif est la durée de vie. Le polycarbonate est sensible aux rayons ultraviolets, qui dégradent progressivement ses propriétés mécaniques. C’est pourquoi il est recommandé de remplacer un casque en plastique tous les 3 à 5 ans, même sans chute. Les fibres composites, protégées par un vernis anti-UV, sont chimiquement inertes et ne vieillissent pas de la même manière. Leur durée de vie est donc plus longue, ce qui peut amortir le surcoût initial. Le choix dépend donc de votre usage : pour un usage occasionnel, le polycarbonate est un choix intelligent. Pour le rouleur quotidien ou le passionné de performance, l’investissement dans les fibres se justifie pleinement par le gain de poids, de longévité et par sa philosophie de protection.
Les matériaux du futur que vous ne trouverez que sur un prototype de course
Si les composites à base de carbone, d’aramide et de verre dominent aujourd’hui le marché haut de gamme, les laboratoires de recherche et les départements compétition des fabricants explorent déjà la prochaine génération de matériaux. Ces innovations, pour l’instant réservées à des prototypes ou à des séries très limitées, dessinent l’avenir de la protection du motard, avec deux axes de développement majeurs : la performance durable et l’absorption intelligente de l’énergie.
Le premier grand chantier est celui de l’éco-conception. La production de la fibre de carbone est très énergivore et les résines époxy sont issues de la pétrochimie. Les alternatives écologiques gagnent du terrain :
- Fibres de basalte : Issues de la roche volcanique fondue, elles présentent des propriétés mécaniques très proches de la fibre de carbone, avec une meilleure résistance aux hautes températures et un processus de fabrication moins polluant.
- Fibres de lin bio-sourcées : Cultivées en Europe, ces fibres végétales affichent d’excellentes capacités d’absorption des vibrations. Leur utilisation peut réduire l’empreinte carbone d’un composite de 75% par rapport à une solution en fibre de verre.
- Composites à matrice thermoplastique : Contrairement aux résines thermodurcissables actuelles (époxy, polyester) qui ne sont pas recyclables, ces nouveaux composites peuvent être fondus et reformés en fin de vie, ouvrant la voie à des casques entièrement recyclables.
Le second axe de recherche est celui des matériaux « intelligents ». L’idée n’est plus seulement d’avoir une coque passive, mais une structure qui adapte sa réponse en fonction de l’impact. La technologie la plus prometteuse est celle des structures auxétiques. Contrairement aux matériaux classiques qui s’amincissent lorsqu’on les étire, un matériau auxétique a la propriété contre-intuitive de s’épaissir perpendiculairement à la force de l’impact. Intégrée dans un calotin de casque, une telle structure se densifierait précisément au point de choc, offrant une absorption d’énergie localisée et bien plus efficace. Ces technologies, encore au stade de la recherche fondamentale, pourraient révolutionner la manière dont nous concevons la dissipation d’énergie dans les dix prochaines années.
À retenir
- La supériorité d’un casque en fibres ne vient pas d’un seul matériau, mais de la synergie intelligente entre différentes fibres (carbone pour la rigidité, aramide pour la perforation, verre pour l’absorption).
- Le prix élevé des casques composites est justifié par un processus de fabrication majoritairement manuel, long et complexe (drapage, cuisson en autoclave), garant d’une performance optimale.
- Un casque plus léger est un élément de sécurité active : il réduit drastiquement la fatigue cervicale sur longs trajets, maintenant ainsi le pilote plus alerte et réactif.
Le casque intégral : anatomie d’une décision non-négociable
Après avoir exploré la complexité des matériaux, une vérité demeure, simple et brutale : quelle que soit la technologie, elle ne sert à rien si elle ne couvre pas la zone d’impact. Or, toutes les études sur l’accidentologie moto convergent vers une conclusion sans appel. Une étude de référence en la matière, l’étude Dietmar Otte, démontre que près de 30% des impacts se produisent dans la zone du menton. Ce chiffre seul devrait clore tout débat : le port d’un casque jet ou d’un modulable en position ouverte en roulant relève d’un pari statistique que nul motard rationnel ne devrait prendre.
Le casque intégral n’est pas une option, c’est la seule décision logique pour qui place sa sécurité au premier plan. Sa structure monobloc garantit une intégrité structurelle maximale tout autour du crâne. La mentonnière n’est pas un simple accessoire de confort, c’est une partie vitale du système d’absorption d’énergie, conçue et testée pour résister à des chocs violents.
L’arrivée de la nouvelle norme d’homologation ECE 22.06 a encore renforcé cette exigence. Plus stricte, elle impose désormais un test d’impact sur la mentonnière, ainsi que des tests à différentes vitesses et des tests de chocs obliques pour mieux évaluer la résistance aux forces rotationnelles, responsables de graves lésions cérébrales. Cette norme a tiré l’ensemble du marché vers le haut. Pour preuve, l’observatoire indépendant Certimoov révèle que près de 75% des casques ECE 22.06 testés atteignent au moins 3 étoiles sur 5, un gage de sécurité amélioré. Choisir un casque intégral homologué 22.06, c’est s’offrir le plus haut niveau de protection validé par la science actuelle.

Comprendre la science des composites est fascinant, mais cette connaissance ne doit pas faire oublier le principe premier : la meilleure armure est celle qui couvre la totalité de ce qu’elle doit protéger. Le choix des matériaux, le poids, le confort sont des critères de sélection importants, mais ils ne viennent qu’après la décision fondamentale et non-négociable du casque intégral.
Pour faire le choix le plus éclairé pour votre prochaine protection, l’étape suivante consiste à évaluer ces technologies non pas comme des matériaux isolés, mais comme un système de sécurité complet dont vous comprenez désormais l’anatomie.
Questions fréquentes sur les casques moto composites et la norme ECE 22.06
Peut-on encore porter un casque ECE 22.05 en 2024 ?
Oui, les casques homologués selon l’ancienne norme ECE 22.05 restent parfaitement légaux à l’usage sur la route. Seule leur fabrication et leur vente à l’état neuf sont interdites pour les professionnels depuis janvier 2024. Vous n’avez donc aucune obligation de remplacer votre casque 22.05 s’il est encore en bon état.
Les casques ECE 22.06 sont-ils plus lourds ?
En moyenne, les exigences plus strictes de la nouvelle norme ont pu entraîner une légère augmentation de poids d’environ 50 grammes sur certains modèles, due au renforcement des coques et des calotins. Cependant, les fabricants haut de gamme ont réussi, grâce à l’optimisation des composites, à maintenir des poids identiques, comme c’est le cas pour le Schuberth C5.
Quelles sont les principales améliorations de la norme 22.06 ?
La norme ECE 22.06 représente un bond en avant significatif pour la sécurité. Les principales améliorations incluent : 18 points d’impact testés sur le casque (contre 6 auparavant), des tests d’impact à différentes vitesses (basse, moyenne et haute vitesse à 6, 7.5 et 8.2 m/s), et surtout, l’introduction de tests d’impacts obliques pour mesurer la capacité du casque à protéger contre les accélérations rotationnelles, une cause majeure de lésions cérébrales.